Silent Hill : Shattered Memories sur Wii

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Détails

Titre : Silent Hill : Shattered Memories

Développeur : Climax

Date de sortie en France : 25 février 2010

Série : Silent Hill, Silent Hill 2, Silent Hill 3, Silent Hill 4 : The Room, Silent Hill : Homecoming, Silent Hill : Origins, Silent Hill 8 (titre final non défini)

Autres Supports : PS2/PSP

Prix : variable, mais sur Amazon.uk ça peut être moins cher…

Genre : Survival Horror Psychologique

Rating : 16 ans et plus

Online : non

Résumé : Harry Mason ne va pas très bien en ce moment, ça c’est le moins qu’on puisse dire ! D’ailleurs, c’est un peu pour ça qu’il se retrouve chez le psy à déballer sa vie privée. Lors de la séance, il est amené à revenir sur les terribles évènements qui se sont produits à Silent Hill par une nuit de blizzard. Alors qu’il rentrait avec sa fille, Cheryl, il fut victime d’un accident de voiture et se réveilla seul dans la neige. Cheryl avait disparu. Mais ce n’était pas l’unique événement étrange et inquiétant de la soirée. Silent Hill telle qu’il la connaissait ne semblait plus être. La glace et la neige avait tout envahi, sa maison était habitée par des inconnus et d’horrifiantes créatures s’étaient mis à le poursuivre…

Conditions de test : le jeu a été testé à la fois sur une TV LCD SD et TV HD (Samsung LED B6000, en YUV).

Critique :

Ah, Silent Hill ! Voilà une série qui aura marqué d’une pierre sanglante et psychotique le monde du Survival Horror lors de la sortie du premier épisode sur Playstation il y a déjà plus de dix ans. Certains se souviendront peut-être encore que sa démo était fournie en Europe avec un autre grand jeu : Metal Gear Solid. Ce Shattered Memories, s’il ne porte aucun numéro, est en fait le septième opus de la série tortueuse de Konami. Et ce sont les développeurs de Climax qui s’en sont chargé cette fois. Le studio avait déjà travaillé sur Silent Hill : Origins sur PSP et paraissait tout désigné pour succéder à la team Silent Hill (qui s’est vu retirer le bébé suite au contesté épisode 4). Il faut dire qu’après le quasi désastreux Homecoming de Double Helix, sorte de mélange douteux entre l’univers du second opus et le film lui-même autre mélange douteux des quatre premiers, il était difficile de faire pire et on aurait pu s’attendre à un accueil optimiste. Et pourtant… Ce septième épisode a eu bien des difficultés à éviter les jugements acerbes. Notamment car il s’annonçait dès le départ comme un remake ou plutôt une réécriture du mythique premier Silent Hill. Notamment car il délaisse l’univers gore, rouillé et délicieusement malsain de la série pour opter pour… un monde enneigé ! Oh mon dieu, mais qu’a donc fait Climax ?

 

 

L’horreur autrement

 

C’est vrai qu’à regarder les captures, ce Shattered Memories ne semble avoir de Silent Hill que le nom et l’histoire globale.  Ici, Silent Hill est en plein blizzard et le monde alternatif est un labyrinthe de glace qui annonce l'apparition de monstres qui ne vous lâcheront pas d'une semelle. Des monstres qui ne sont d’ailleurs plus aussi dégoûtants que ceux des précédents épisodes. Il n’y a plus de cadavres dans tous les coins obscurs, ni de petit lapin rose à l’air psychopathe qui vous regarde de l’autre côté d’un trou dans le mur alors que vous croyez espionner innocemment votre voisine. Les personnages issus du premier épisode (Harry, Dahlia, Cybil, Kaufmann...) n'ont souvent aucune ressemblance avec leurs modèles passé.  Comme le jeu ne se passe plus en 80, la radio a disparu et, aec notre appareil photo High Tech, on peut prendre la trombine de fantômes et autres échos du passé se trouvant dans le décor, un peu comme dans un Project Zero, ou bien recevoir des messages de leur part. Par ailleurs, le jeu est constamment entrecoupé de scénettes avec notre ami le psy (M. Kaufmann, donc) qui nous pose toutes sortes de questions, ce qui ne semble là, au premier regard, que pour diminuer la tension. au lieu de l'intensifier Pire, il n’y a pas de combats ! Il faut fuir à travers un labyrinthe lorsque les lieux se couvrent de glace et que les ennemis apparaissent ! Horreur ! Damnation ! Qu’est-ce donc ? Un Silent Hill pour les enfants ? Pour les nouveaux joueurs qui n'ont jamais abordé la saga ? La série aurait-elle pris un virage grand public ? Se fout-on de nous ? Eh bien… Non !

 

Jamais l’adage « ne pas se fier aux apparences » n’aura été aussi juste. Si l’on devait le dire encore autrement, ce serait par « ce n’est pas parce qu’un jeu ne déverse pas des hectolitres de sang et n’a pas de combats qu’il n’est pas adulte ». Dans le cas présent, Climax s’est avant tout penché sur l’horreur de notre monde bien réel plutôt que sur l’horreur fantasmagorique plus habituelle de la saga. Bien que cela n’empêche pas quelques passages proprement surréalistes ou diverses interprétations possibles du scénario, il vaut mieux pour vous oublier au plus vite les dieux ou démons Lovecraftiens des précédents épisodes. Ce Silent Hill ne ressemble à rien de ce que l'on a connu. Il est clairement psychologique, bien plus encore que ne pouvait l’être le second épisode et son histoire d'amour morbide. Non, les monstres ne sont pas particulièrement effrayants ou perturbants malgré leur rapidité et leur ténacité. Cependant, Shattered Memories présente son lot de situations glauques, que ce soit dans l’histoire familiale de Harry Mason lui-même, les questions sur votre vie intime que vous pose Kaufmann lors des intermèdes qui entrecoupent les différentes phases du jeu ou bien les échos du passé et les fantômes que ce même Harry détecte grâce à son portable. Viol, prostitution, suicide, drogue, violence familiale... Vous ne verrez plus la petite ville tranquille de Silent Hill et ses habitants du même oeil après votre visite. La fin elle-même risque fort de vous faire un petit quelque chose au niveau lacrymal et de vous prendre par surprise comme jamais un jeu de la saga ne l'aura fait. Mais il y a mieux encore, ce qui fait de ce Silent Hill un Survival Horror particulièrement intéressant : le jeu se modifie subtilement selon vos actions.

 

 

C’est moi qui décide !

 

Habituellement, un Silent Hill ne présente pas de grandes différences entre la première partie et la seconde. Bien sûr, on débloque parfois des éléments permettant d’obtenir une fin différente (le second) ou bien notre comportement envers un personnage modifie la fin (le quatre) mais on ne peut pas dire que le replay value soit très important, sauf pour mieux comprendre le scénario alambiqué ou refaire l’ensemble dans un mode plus difficile (ou tester les costumes de Heather dans le trois). Dans cet épisode, Climax s’est arrangé pour que le contenu change à chaque partie pour peu que notre façon de jouer soit différente. Grosso modo, le déroulement reste quand même le même, on ne peut pas dire qu’il n’y ait pas de script ou de fil rouge, que le jeu va être radicalement différent de A à Z, mais certains évènements ne se produiront pas dans une partie ou seront remplacés par d’autres. L’apparence des monstres elle-même évoluera et, si vous êtes ambiguë dans vos choix, il est même possible d’avoir plusieurs types de monstres en jeu ou des hybrides.

 

Dit comme ça, ça semble un peu tordu. Concrètement, au tout début du jeu, notre cher psy posera plusieurs questions (vos relations avec les autres, votre goût pour l’alcool ou la drogue, votre perception du sexe, du couple…). Autant y répondre franchement, car cela renforcera votre première expérience du jeu (vous pourrez tester d’autres possibilités par la suite), étant donné que celui-ci dressera tout à la fin votre portrait psychologique et vous le déballera très gentiment. Selon vos réponses, différentes choses se produiront durant la partie. Si votre profil est celui d’un obsédé sexuel et, qu’en prime, vous matez tous les posters érotiques disséminés dans le jeu, les monstres prendront une apparence autrement plus féminine et outrancière, qui ne sera pas sans rappeler les célèbres infirmières... en plus grotesque. Si vous faites une obsession sur les rares traces de sang que vous croisez, ils se feront autrement plus écorchés. Une personnalité logique et psychorigide donnera aux créatures une apparence de chef d’œuvre de l’art moderne. Etc… Les monstres ne sont pas seuls à évoluer. Plus vous regardez de posters érotiques, plus le jeu aura une orientation sexuelle. Les personnages féminins auront une apparence et une personnalité adaptées à vos penchants. Les décors évolueront aussi en fonction en affichant par exemple une statue de femme dénudée à la place d'une mascotte plus innocente. Les échos que peut capter Harry auront un contenu différent, révèleront parfois un bout de leur histoire que vous ne pourriez pas trouver si votre Harry était alcoolique et drogué ou un bon père de famille tout à fait banal et qui n'a jamais causé de problème à personne. Concrètement, certaines parties seront plus glauques que d'autres selon la façon dont vous façonnez Harry. Évidemment, tout ceci aura un impact sur la fin du jeu (cinq, en comptant l'habituelle fin humoristique UFO).

 

 

Une réussite totale ?

 

La partie musicale est toujours composée par Yamaoka. Est-ce moins bon ou meilleur qu’avant ? Ce sera à chacun d’en décider. Si vous avez aimé le thème principal de Silent Hill 4 (Room of Angel), vous aimerez sans aucun doute le thème final de Shattered Memories (Acceptance). Niveau doublage, les acteurs jouent tous très bien. Ce n’est vraiment pas sur ce point qu’on pourra accrocher ce nouvel épisode.

 

Bien que conçu pour la Wii, Shattered Memories passe plutôt bien graphiquement et il s’agit par ailleurs de l’un des plus beaux jeux de la console. Certaines personnes ont été déçues en ayant l’impression que les textures étaient moins fines que sur PS2 ou que l’aliasing était plus présent. Il est nécessaire de rappeler que les épisodes sur PS2 affichaient des filtres qui diminuaient les imperfections dues au hardware plus ou moins calamiteux de Sony. Par ailleurs, les environnements n’étaient pas aussi vastes. Ce sont les deux plus grosses raisons qui font qu’ils restent toujours attractifs de nos jours sur un écran SD. Pour cet épisode, Climax ne semble pas avoir opté pour ce genre d’artifices, à tort ou à raison. Cependant, les effets de lumière et de transparence sont particulièrement convainquant, digne de la série, et les personnages bien modélisés et animés. Le chara-design reste un poil moins heureux que celui de la team d’origine mais cela dépend aussi des goûts. Les décors sont quant à eux très détaillés et variés mais, comme dans les précédents épisodes, il ne faut pas s'attendre à pouvoir visiter chaque recoin de Silent Hill. Ce sera peut-être pour le prochain épisode sur Xbox 360 et PS3 ?

 

Malheureusement, sur une TV HD, le jeu ne brille pas vraiment, contrairement à Fragile. On ne se brûle pas les yeux, faut pas charrier non plus, mais on voit qu’une Wii + (ou du moins la console qui lui succèdera) avec une vraie capacité d’upscale native et un système d’anti-aliasing pour les jeux Wii serait nécessaire pour des jeux aussi ambitieux graphiquement. En clair, une nouvelle console qui soit au moins aussi capable que l’émulateur Dolphin, les ralentissements en moins. La balle est dans le camp de Nintendo, en espérant qu’ils ne fassent pas un coup à la PS3 qui s’est vue très vite castrée de sa rétro-compatibilité. En attendant, c’est à vous de voir selon votre matériel. Une bonne TV HD, bien réglée et avec le recul suffisant, fera toujours mieux qu’un écran SD médiocre, mais une excellente TV SD ne pourra que faire honneur à votre Shattered Memories en l’état actuel des choses.

 

Côté gameplay, le bas blesse un peu. Tant qu’on s’en tient à l’exploration, la maniabilité est très convaincante et le couple wiimote/nunchuk bien exploité. Pour les communications du téléphone, on peut aussi choisir de les faire sortir par le haut parleur de la wiimote (plus immersif mais le son est de moins bonne qualité) ou bien par les hauts parleurs de la télévision. La wiimote, toujours, permet de guider le faisceau de la lampe torche pendant que l'on utilise le nunchuck pour faire avancer Harry. Quelques passages donnent aussi l'occasion de manipulations, comme par exemple pour déverrouiller une porte ou bien faire tomber un objet mis dans une canette.

 

Par contre, lorsque l’on passe aux séquences de fuite, le bilan est moins enthousiaste. Le jeu n’est pas bien difficile, sauf à cause de cet aspect précisément. Vous ne pouvez pas tabasser sauvagement vos adversaires et ces petits salauds courent très vite. Il est possible de jeter des objets sur le sol pour les ralentir et les semer, mais encore faut-il en avoir le réflexe. puisque seuls certains types d'éléments, comme les armoires, peuvent être déplacés. Quant à se cacher, il faut savoir que les monstres finissent toujours par vous retrouver. Par ailleurs, afin de se débarrasser des monstres qui vous saute dessus, il faut agiter dans un sens et en même temps nunchuck et wiimote, ce qui n'est pas toujours évident dans la panique. Mais ça, encore, ça va. La vraie frustration vient du plan qui peut vous aider à sortir du monde de glace. Pour l’afficher, il faut sortir le portable de Harry. Quand on sort le portable, on ne peut plus courir. Le jeu ne se met pas en pause non plus. Et, là, c’est franchement la crise de nerf assuré lors de la toute première partie, car il est très facile de se perdre si on ne parvient pas à garder son sang froid. Plus encore, le jeu vous demandera parfois d’accomplir certaines actions dans le monde de glace, comme prendre des photos de certains échos à un endroit précis ou bien retourner sur vos pas pour résoudre une énigme. Or, comme il vaut mieux sortir votre plan lorsque vous êtes loin des monstres et que ceux-ci ont du mal à vous lâcher la grappe… Clairement, cette partie du jeu n’est pas insurmontable mais les joueurs les moins patients vont très vite regretter l’aspect « tape dur et sans pitié » de Silent Hill 3 et 4. Elle empêche aussi Shattered Memories de prétendre au titre de Survival Horror parfait de la Wii, même si la concurrence dans ce domaine est quasi absente.

 

 

Si ce Shattered Memories n’est malheureusement pas parfait, force est de reconnaître que Climax a su s’approprier l’univers du jeu pour apposer sa marque. En même temps, les développeurs ont pris un risque considérable. En changeant la recette, il est évident que le studio s’est aliéné une partie des puristes. Silent Hill 4, qui avait amorcé un virage tout aussi radical, a été très critiqué à son époque. Pourtant il est loin d’être mauvais ou de n’avoir de Silent Hill que le nom. Il en est de même pour cet opus qui, tout en dépassant de très loin l’imitation sans génie qu’était Homecoming, pourra s’avérer très déroutant à cause de ses partis pris. Mais que voulons-nous vraiment ? Une simple copie de Silent Hill premier du nom, du second, du trois, voire même du quatrième, ou du sang véritablement neuf ? Shattered Memories présente une vraie évolution dans un monde vidéoludique de plus en plus cloisonné dans la répétition et la facilité. Non seulement il ne ressemble pas à un autre Silent Hill, mais en prime il ne ressemble pas à un autre Survival Horror. Rien que pour ça, il mérite le plus grand respect. Le prochain Silent Hill sera (encore) confié à un nouveau studio mais il serait intéressant que Climax s'essaye à nouveau au genre.

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